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Une recherche atypique pour un traitement peu typique!
Alors que la prévalence des douleurs chez les personnes âgées augmente, la difficulté de leur prise en charge n’est pas moins augmentée du fait des effets iatrogènes des médicaments prescrits, de la polymédication, des polypathologies associées. Nombreux sont les scientifiques ou les industriels qui recherchent le « Saint Graal » : l’antalgique efficace ne présentant pas d’effet indésirable et bien toléré dans cette population. La solution serait-elle dans cette molécule : le palmitoylethanolamide (PEA) ? C’est une N-acylethanolamine endogène qui est retrouvée dans de nombreux tissus et dont les quantités varient selon les stress, dont la douleur. Elle semble réduire le recrutement et l’activation des mastocytes et des médiateurs pro-inflammatoires impliqués dans la genèse des processus de douleur et d’inflammation. Cette molécule est disponible dans certains pays sous forme micronisée ou ultra-micronisée, plutôt comme complément alimentaire, mais elle n’existe pas comme médicament et n’a pas fait l’objet d’AMM. Quelques études semblent confirmer son effet antalgique indépendamment de l’âge, du sexe ou de l’étiologie même des douleurs… Ces études, peu nombreuses et discutées, ne nous semblent pas suffisantes à ce jour. Dans cet article publié dans Trials, le protocole proposé et qui doit être mis en place est un peu particulier, appelé « N-of-1 », généralement utilisé pour les maladies rares. Il consiste en l’observation de l’efficacité du PEA à 600 mg deux fois par jour, sur 18 semaines, pour chaque patient (chaque cas) en double aveugle randomisé versus placebo. Chaque patient, âgés de plus de 65 ans, sera lui-même son propre contrôle après des périodes de wash-out, de façon alternative. L’étude durera 18 semaines, évaluant la douleur (soit en auto-évaluation et échelle des visages pour les patients communicants, soit hétéro-évaluation pour les autres), le recours aux médicaments antalgiques « de secours » (paracétamol, opioïdes faibles), l’évaluation des activités quotidiennes (auto ou hétéro-évaluation). Les effets indésirables seront également colligés, toutes ces données recueillies soit par téléphone soit lors de consultations. Pour permettre l’obtention de résultats exploitables, une méta-analyse de chaque cas essai « N-of-1 » sera ensuite réalisée.
L’intérêt de cette étude, pour nous, réside dans différents points: l’originalité de sa structure, avec ses limites en terme de puissance, et la molécule en elle-même, présentée comme une alternative intéressante. Cette dernière donnée semble toutefois très optimiste: efficacité chez la personne âgée, sans réel effet secondaire majeur ni contre-indications ? Nous pourrions également discuter des outils d’évaluations qui paraissent parfois un peu trop subjectifs notamment dans les groupes « auto-évaluation » des patients non ou mal communicants. Malgré ces réserves, ce type de démarches, issues d’équipes de centres d’investigation clinique et non de spécialistes de la douleur nous prouve à quel point il est nécessaire de collaborer, de développer les échanges pour faire avancer les connaissances sur les antalgiques et ouvrir de nouvelles voies thérapeutiques.
Reference
Maura Marcucci, Federico Germini, Anna Coerezza, Luca Andreinetti, Lorenzo Bellintani, Alessandro Nobili, Paolo Dionigi Rossi, and Daniela Mari.
Trials. 2016; 17: 369. Efficacy of ultra-micronized palmitoylethanolamide (um-PEA) in geriatric patients with chronic pain: study protocol for a series of N-of-1 randomized trials